Le toucher, premier mode de communication parents-enfant

Caroline Bresson

Puéricultrice, responsable en établissement d’accueil du jeune enfant

 

La qualité de la relation que les parents établissent avec leur enfant, dès les premiers mois de sa vie, exerce une influence déterminante sur son développement global, sa capacité d’adaptation psychologique et son développement cognitif, affectif, physique et moteur. En tant que professionnels de la petite enfance, nous nous devons de veiller au bien-être des enfants, ce qui va bien au-delà de répondre aux simples besoins fondamentaux. Le toucher est un moyen de communication qui permet de prévenir, renforcer ou guérir le lien unissant les parents à leur enfant et de favoriser indéniablement le bien-être de chacun.

Pour le Larousse, la définition du mot “toucher” est la suivante : « mettre sa main, ses doigts au contact de quelque chose, de quelqu’un en particulier pour apprécier, par les sensations tactiles, son état, sa consistance, sa chaleur » [1].

Le toucher est le premier mode de communication. Il peut être considéré comme le sens le plus important de l’être humain. Il implique toujours la présence conjointe et immédiate de deux corps. En effet, l’œil peut voir sans être vu, l’oreille peut écouter sans être entendue, mais la main ne peut toucher sans être elle-même touchée. C’est le seul sens qui soit réciproque. Le toucher humain fournit au bébé un élément nutritif vital. Si le bébé en manque, son développement physique et émotionnel sera compromis. Et s’il en reçoit à volonté, il se développera normalement, dans de bonnes conditions pour être vigoureux et en bonne santé.

La place du toucher en Occident

Dans les sociétés occidentales, l’industrie de la puériculture incite les femmes à avoir une multitude de matériels pour s’occuper de leurs bébés (poussette, table à langer, berceau, parc, transat, etc.). Ceux-ci ont tendance à diminuer les relations affectives directes ainsi que les contacts, dont on a souvent oublié le besoin qu’en éprouve l’enfant. Dans les pays industrialisés, le toucher est moins utilisé comme mode de communication que le regard et la parole. Le bébé peut passer des heures, seul, dans son parc ou dans son lit, contrairement aux enfants nés dans les pays en voie de développement qui, souvent, sont portés toute la journée. La stimulation plus ou moins importante de la peau au travers de touchers ou de massages explique les différences de sensibilité de la peau d’un individu à l’autre.

Le fait de porter des vêtements dès la petite enfance fait que la peau ne peut pas développer toute la sensibilité qu’elle aurait eue si elle n’avait pas été constamment recouverte. Cependant, les sensations continues apportées par les tissus sont sécurisantes pour l’enfant.

Communiquer en touchant

Répandu dans le monde entier, le toucher constitue un moyen important de faciliter un attachement sécurisant entre les et les enfants. Grâce au contact physique, le parent communique directement son amour, son affection et son respect à son enfant. Le fait de toucher un bébé, de le prendre, le serrer contre soi ou de l’embrasser favorise non seulement son développement, mais aussi la formation du lien d’attachement.

Le toucher, doux contact d’amour mutuel, est essentiel pour former ce lien affectif entre le parent et l’enfant. Ce processus s’avère vital : il a un impact sur la croissance affective et le développement physique.

Contrairement à la vue et à l’audition, le toucher et l’odorat sont parfaitement fonctionnels dès la naissance. Le bébé a largement pris son temps pour les perfectionner in utero. Le toucher est le premier sens à se mettre en place.

À l’accouchement, les contractions de l’utérus stimulent la peau du bébé. Le sens du toucher fonctionne à plein régime dès la naissance. L’enfant perçoit de tout son être et sur toute sa surface corporelle qu’une distinction des corps s’opère.

Même si le bébé est encore quasiment incapable de gestes volontaires, toute sa peau est un gigantesque réceptacle à sensations : le contact avec la chaleur et la douceur d’une autre peau suffira bien des fois à calmer ses pleurs…

Les yeux permettent une communication intense. Aussi, pendant que l’on touche son enfant, il est important de maintenir autant que possible le contact visuel.

Une bonne communication exige de la flexibilité. Si l’enfant veut se tourner ou changer de position, il ne faut pas le maintenir de force. Nous devons l’écouter, le regarder et sentir ce qu’il nous dit. C’est un vrai échange entre le parent et l’enfant, mais aussi entre l’enfant et son parent.

Le toucher pendant la grossesse

Le fœtus est submergé par le toucher. Il est constamment bercé contre la paroi chaude de l’utérus, le liquide et la fine membrane amniotiques, lui donnant des sensations rassurantes.

Le bébé gardera en mémoire ces sensations de contact de sa tête avec l’utérus, par exemple.

Les retrouver après la naissance pourra lui rappeler sa vie in utero et l’aider à s’apaiser.

Une relation par le toucher peut se développer avec l’enfant dès sa vie intra-utérine. Cela fait référence au concept d’haptonomie développé par le thérapeute Frans Veldman [2], au cours de la Seconde Guerre mondiale.

Témoin des traumatismes de la déportation, ce dernier a pris conscience de l’énorme besoin de sécurité chez l’être humain et de l’existence d’un « langage non verbal » : le toucher, le geste, l’intonation de la voix, le regard, la présence, etc. Il s’agit d’une rencontre in utero qui s’établit avec les mains et la voix à travers le ventre de la mère.

Les parents qui ont suivi des séances d’haptonomie s’en souviendront avec émotion : dès les quatre mois et demi de grossesse, leur enfant réagit au contact de la main. Cette méthode met donc en avant le sens du toucher et la parole pour créer une relation, un lien affectif prénatal. La pratique haptonomique prénatale permet d’accompagner les interrelations pendant la vie anténatale : la capacité de la maman à inviter ou à guider son bébé de l’intérieur, lui faire prendre conscience du sentiment de sécurité de base, du port du bébé, de sa faculté à “rester là, avec”. Cette science de l’affectivité montre que le bébé vit et met en avant le dialogue coeur à coeur, préverbal entre la mère et son enfant. Il se réalise alors une syntonie affective entre la mère et l’enfant, qui développera chez le futur nouveau-né une sécurité de base, une « première demeure d’amour », comme l’écrit Frans Veldman.

Le toucher en salle de naissance

L’émergence dans un monde nouveau d’air et de lumière, le passage à une existence autonome peuvent constituer une expérience accablante pour le nouveau-né.

Du fait de son rôle dans l’expulsion, la mère est plus à même de renoncer au contact avec l’enfant, de l’intérieur, au profit d’un contact peau à peau. Le passage de la vie intra-utérine à la vie extra-utérine, un monde inconnu et froid comparé à la chaleur du ventre maternel, peut générer un stress. Le nouveau-né se sent perdu, il a besoin de la présence sécurisante de sa mère pour découvrir ce nouveau monde de manière progressive.

Le peau à peau

Le peau à peau est inspiré de la méthode kangourou utilisée à Bogota en Colombie, par les professeurs Edgar Rey et Hector Gómez Martinez [3], pour pallier les moyens techniques insuffisants face à la prématurité. Ils ont constaté que le rapprochement physique de l’enfant avec ses parents diminuait significativement le taux de mortalité et le temps d’hospitalisation des nouveau-nés. Cette technique consistait à faire porter les bébés de petit poids de naissance, peau à peau contre la poitrine de leur mère, vingt-quatre heures sur vingt-quatre. En France, cette médiation est de plus en plus utilisée dans les services de maternité et de néonatalogie afin de favoriser la détente, la rencontre et le lien d’attachement parents-enfant. L’enfant, en couche, est placé sur la poitrine dénudée de la mère ou du père. Cette méthode se pratique dès la naissance mais aussi en suites de couches. Il est indispensable que le parent soit assis sur un fauteuil confortable.

Quand le peau à peau est proposé, le cadre doit être le plus intime et agréable possible, c’est pourquoi il est parfois nécessaire de baisser les stores, fermer la porte, chauffer un peu la pièce, de bien choisir le moment, de laisser un temps calme aux parents avant de commencer, voire de les laisser seuls si tout se déroule bien (après avoir transmis les règles de sécurité). Le peau à peau peut être proposé même si le bébé a une ventilation nasale ou une sonde d’alimentation, mais l’accord de l’infirmière doit être demandé au préalable car la séance peut durer de trente minutes à plusieurs heures. Parfois, les parents éprouvent des difficultés à trouver un bon ajustement et une installation confortable avec leur bébé, l’accompagnement est donc essentiel dans un premier temps pour les soutenir et les aider à passer un moment agréable.

Cette technique permet une multitude de stimulations, l’enfant, comme son parent, peut s’imprégner de l’odeur, percevoir la voix et les battements du coeur ou encore la texture de la peau, les regards s’échangent, les premiers liens d’attachement se tissent. Cette méthode présente ainsi de nombreux avantages, sans oublier que, pour les mères désirant allaiter, le peau à peau stimule la montée de lait tandis qu’il favorise l’endormissement et apaise le nouveau-né. Quand la naissance est difficile, c’est une vraie rencontre bienfaisante entre le parent et l’enfant. La séparation mère enfant dès la naissance Aujourd’hui en maternité, les salles d’accouchement sont faites de telle façon que l’enfant reste auprès de sa mère dès son arrivée au monde. Tout est là dans la salle pour s’occuper du bébé, de la maman, sans qu’aucun des deux ne se quitte.

Il faut protéger la rencontre de la mère et de son enfant autour de la naissance. C’est une période sensible au cours de laquelle s’établit ce lien primordial. L’attachement passe par des phénomènes physiologiques mis en jeu dans le corps de la mère et du bébé. Le contact étroit, corps à corps, entre eux est essentiel pour son accomplissement. Les “massages” engendrés par les mouvements de son nouveau-né sur sa poitrine lors du premier contact à la naissance déclenchent une activation neuroendocrine et modifient son comportement à l’égard de son enfant. Tous les mammifères, lorsqu’ils ont subi une séparation mère/nouveau-né précoce, montrent une perturbation de leur comportement à l’âge adulte portant sur l’apprentissage, la socialisation, ainsi que sur la gestion du stress [4].

Cependant, la décision médicale de séparer un nouveau-né de sa mère autour de la naissance n’est pas rare. Cette séparation est parfois ponctuelle, motivée par le souci de renforcer la surveillance après un accouchement difficile ou une simple césarienne.

L’accueil peau à peau n’est alors pas pratiqué et l’enfant ne retrouve sa mère qu’après quelques heures. Cette séparation est parfois prolongée lorsque des soins spécifiques entraînent un transfert vers une unité de néonatalogie.

Le toucher en réanimation chez le bébé prématuré

Dans un service de néonatalogie, il est fréquent que les parents n’osent pas toucher leur enfant les premiers jours, de peur de lui faire mal, ou le touchent du bout des doigts. C’est pourquoi il est important de les inviter, pour eux et pour l’enfant, à une approche corporelle par le toucher.

On peut distinguer trois formes de touchers, qui se font suivant un ordre hiérarchique :

Le toucher contenant, le toucher sensoriel et le toucher sensori-moteur. Quand le parent est disponible et qu’il en a le désir, il peut les réaliser. La qualité du toucher est importante

: il doit être ferme, doux, lent et englobant afin de procurer au bébé une expérience agréable. Mieux vaut toujours garder un contact avec le corps de l’enfant. La durée de la séance dépend de la disponibilité du bébé, toute mimique d’inconfort nécessitant l’arrêt. En majorité, cette pratique dure environ quinze minutes. Le toucher contenant Cette technique permet de calmer et de rassurer les bébés. En décubitus dorsal, elle consiste à rassembler les membres inférieurs et/ou supérieurs du bébé sur son axe, par un toucher apaisant et sécurisant avec la paume d’une main posée fermement. L’autre main se place sur le crâne de l’enfant (pouvant rappeler le contact avec la paroi utérine). En décubitus latéral, elle consiste à placer une main sur la tête du bébé, les doigts glissant jusqu’à la base de crâne, tandis que l’autre main soutient fermement les fesses. Les membres sont en flexion sur le tronc et le dos est enroulé.

Le toucher sensoriel

Le but de ce toucher est d’obtenir la détente et le confort de l’enfant. On ne cherche pas à apprendre une technique aux parents, il s’agit de les inviter, par le toucher, à entrer en contact avec leur enfant en lui procurant des sensations douces et réconfortantes. Les stimulations servent donc à la fois à développer les sens, stimuler le système nerveux, favoriser la détente musculaire du bébé et donner une place aux parents dans ce milieu très médicalisé. On portera une attention particulière aux interactions que les stimulations induisent. Pour que les parents ne soient pas inquiets à l’idée de ne pas savoir comment faire, la séance commence par quelques indications tout en pratiquant le toucher sensoriel, en expliquant chaque geste et son objectif. Puis, on laisse les parents “essayer” en devenant progressivement le témoin de ce qui se passe et un soutien lorsque c’est nécessaire.

En pratique, le toucher sensoriel se fait sur la table à langer ou dans la couveuse, cela dépend de l’état de santé du bébé. Il est important de choisir un moment où les deux participants sont disponibles, afin de ne pas se presser et de respecter le rythme de l’enfant.

Le massage peut avoir lieu entre deux tétées ou autour du bain par exemple. Cette médiation ne requiert pas forcément l’utilisation d’huile.

La première prise de contact se fait par le regard, puis est suivie du toucher contenant. On enveloppe ensuite la tête du bébé avec les deux mains et on masse les lobes des oreilles puis le visage avec la pulpe du pouce. On va ensuite envelopper la main du bébé dans les paumes de ses mains, puis masser chaque doigt ainsi que la paume avant de parcourir le bras, de l’épaule à la main par un mouvement glissé. On fera la même chose avec l’autre bras, puis avec les jambes. Le toucher sensoriel de la poitrine, comme celui du dos se font par des glissades transversales, d’une épaule à la hanche controlatérale et en alternance droite/ gauche (via un mouvement croisé). Avant de terminer la séance, on le signale par un contact global sur le tronc avec la paume de la main, ou on finit par un toucher contenant.

Dans le cas où le toucher est réalisé par les parents, un “bisou” est toujours le bienvenu.

Le toucher sensori-moteur

Également appelé “manipulation passive”, le toucher sensorimoteur met en jeu toutes les articulations du corps du bébé. Ce toucher est plus souvent expliqué aux parents que proposé car son but n’est pas d’entrer en relation avec le bébé.

Par des gestes lents et rassurants, on mobilise les articulations de l’enfant, une par une, dans tous les angles fonctionnels. Cela permet d’assurer leur bonne mobilité, de déceler les éventuelles rétractions musculaires, d’assurer la détente et enfin, le plus important, de donner des repères kinesthésiques au bébé. En général, ce toucher est pratiqué avec des nouveau-nés qui ont déjà expérimenté le toucher contenant et le toucher sensoriel, et qui n’ont pas manifesté de répulsions au contact physique. Il est tout à fait possible de commencer par un toucher contenant pour annoncer le début de la séance, de pratiquer un toucher sensoriel court en guise d’échauffement, puis de passer à la manipulation passive avant de terminer par un nouveau toucher contenant.

Les objectifs des divers touchers sont simples : amener une détente musculaire, donner des repères à l’enfant afin qu’il construise son schéma corporel, et enfin permettre la relation en donnant un moyen d’approche et de communication aux parents.

Le toucher en période postnatale

Les parents disent souvent que l’expérience la plus importante pour eux est de découvrir le plaisir de communiquer avec leur bébé. Le massage permet de partager avec lui des instants privilégiés de détente et de bien-être. Il est l’occasion de nombreux échanges : regards, sourires, sons, paroles. Le massage pour bébés fait partie des méthodes employées pour exprimer son amour, son affection et son respect au moyen du toucher. Il a également été démontré qu’il avait une influence positive sur la formation de l’attachement parents-enfants et le développement infantile [5]. Le massage se fait avec l’enfant et pas à l’enfant.

Dans cette forme d’interaction, la mère ou une autre personne prodiguant le soin caresse, et frotte doucement la peau du bébé.

Le massage du bébé

L’utilisation du massage thérapeutique par les cultures orientales remonte à l’an 3000 avant

Jésus-Christ. Le massage des nouveau-nés est pratiqué depuis des siècles par les mères en Asie, Europe de l’Est, Afrique et Amérique latine.

Vimala McClure a fondé l’Association internationale du massage pour bébés après un séjour en Inde en 1973. Employée dans un orphelinat, elle voyait tous les jours des personnes de tous âges se faire masser. Lorsqu’elle est tombée malade, les femmes du village l’ont guérie en lui massant le dos. À son départ du pays, elle a remarqué une jeune femme assise sur le trottoir d’un bidonville en train de masser amoureusement son bébé posé sur ses genoux. Cette scène attendrissante l’a alors convaincue d’introduire les techniques de massage des nouveau-nés en Amérique du Nord, combinant les méthodes observées en Inde à celles du massage suédois, de la réflexologie chinoise et du yoga [6]. Ses techniques de massage ont fait le tour de la Terre et sont maintenant enseignées aux parents et aux soignants en Suède, Australie, Nouvelle-Zélande, Grande-Bretagne, Allemagne et au Canada. Le massage offre de multiples avantages (encadré 2). Le moment du massage donne également aux parents l’occasion d’apprendre à reconnaître les signes que leur bébé leur envoie, pour exprimer son bien-être ou son inconfort. Il est aussi possible, sans forcément masser son bébé, dans les gestes et soins quotidiens de toucher, de découvrir son enfant.

Le bain

Le bain est un moment de prise en soins délicate, riche en stimulations sensorielles et interactions entre le bébé et son parent. D’une main, on le tient fermement pour qu’il ne risque pas de glisser, de l’autre on savonne son enfant. On ressent la douceur de sa peau toute neuve. Même si parfois les gestes sont maladroits, du bout des doigts, l’enfant est touché, massé, caressé. Il découvre qu’il est en sécurité, soigné et aimé. L’eau est enveloppante et rappelle les sensations bien connues par l’enfant in utero. Dans certaines maternités, au-delà d’accompagner et de rassurer les parents dans la réalisation de ce soin, des bains enveloppés sont proposés aux bébés. Ce sont des moments privilégiés, où l’enfant est dans un état de plénitude et de bien-être absolu sous le regard émerveillé de ses parents.

Le holding ou la manière de porter son enfant

Les réflexes archaïques, tels que le réflexe de grasping, d’orientation, de fouissement, et les comportements innés d’attachement, comme les cris ou l’étreinte, visent à assurer la proximité et le contact. Le besoin d’être porté est donc biologiquement inscrit dans le corps du bébé. Le portage est un moment où les liens affectifs et relationnels se construisent, favorisant la dynamique de l’attachement et les échanges. Par cette médiation, les parents apportent à leur bébé une sécurité de base, tout en respectant la position des différentes parties de son corps. Le portage doit être rassurant et enveloppant. Toutes ces positions favorisent évidemment l’enroulement du bébé.

La position bouddha

Une des mains de l’adulte est placée sous les fesses du nourrisson et maintient ses jambes fléchies et rassemblées sur le bassin. L’autre main peut être placée sur le ventre de l’enfant. Il est important que la tête reste dans l’axe du corps. Cette position favorise l’ouverture vers l’extérieur.

La position balancelle

Cette position consiste à porter le nourrisson positionné en décubitus ventral, sur un avant-bras. Le parent passe son avant-bras sous le ventre du bébé et soutient ses hanches avec la main. Cette position favorise une détente musculaire globale du nouveau-né, elle facilite la digestion et calme les douleurs abdominales.

La position érigée

Cette façon de porter est souvent utilisée pour le rot. La tête de l’enfant doit être guidée jusqu’à ce qu’elle repose au niveau de l’épaule de l’adulte (figure 1). Soit le bébé va la laisser reposer en flexion sur l’épaule et sentir l’odeur du cou du parent, soit il va tenter de la contrôler pour explorer l’environnement du regard.

Le mode berceau

L’avant-bras se glisse dans le dos de l’enfant, la main allant soutenir son bassin, tandis que sa tête reste en appui au niveau du coude. Cette position est la plus naturellement utilisée par les parents (figure 2).

Le portage en écharpe

Dans ce mode de portage, les bébés sont enroulés dans une grande écharpe autour du tronc du parent. Cela permet de garder l’enfant sur soi tout en vaquant à ses occupations. Il peut être pratiqué pendant plusieurs heures et stimule le système vestibulaire tout en maintenant une certaine sécurité.

Contrairement aux idées reçues, un enfant qui reçoit suffisamment de chaleur, de sécurité, qui est régulièrement porté, pourra plus tard mieux se détacher. Il développera une plus grande confiance en lui et s’intégrera mieux socialement. Le portage joue donc un rôle notable dans le développement physique et psychique de l’enfant. Quel que soit le mode de portage utilisé, l’important est d’être toujours attentif à l’appui “tête-cou-bassin” lorsque l’on prend son bébé ou qu’on le couche.

Le toucher chez l’enfant et l’adolescent

En grandissant, l’enfant va pouvoir se tenir assis seul, puis marcher, s’habiller et se déshabiller. Ayant moins besoin de sa mère, il est moins souvent porté donc moins touché par elle. L’enfant va perdre en contact ce qu’il gagne en autonomie. Cependant, il reste toujours les “bisous” et les câlins pour se dire “bonjour” et “bonne nuit”. Grâce à son autonomie, notamment locomotrice, l’enfant va pouvoir provoquer ou refuser le contact.

La place du contact corporel chez un enfant et un adulte est bien différente. À mesure que les enfants grandissent, le contact physique est de plus en plus restreint, du moins celui des parents envers les enfants (encadré 3). Pourtant, les enfants et les adolescents peuvent aussi tirer des effets bénéfiques des massages que nous avons évoqués précédemment.

Le toucher chez l’adulte

Dans notre culture, en devenant adulte, les contacts physiques vont avoir tendance à diminuer et surtout à se codifier. On peut dire que le toucher est sans doute le plus réprimé de tous les sens dans nos sociétés. Le contact physique est de moins en moins présent mis à part la poignée de main, de la plus chaleureuse à la plus rapide et la plus banale.

La période de crise sanitaire a encore plus modifié le rapport au toucher. Les gestes barrières prônés pendant plus de deux ans ont banni la proximité et diminué les rencontres. Nos relations aux autres vont-elles s’en trouver modifiées ? Après l’envie de se retrouver, reviendrons-nous à une période hygiéniste, ou justement reviendrons-nous à une période hygiéniste favorisant d’autres moyens de communiquer qu’en se touchant ? En devenant adultes, nos besoins changent. On quitte ses parents, on se rapproche de ses amis, et on rencontre souvent l’amour. On vit avec un compagnon, un mari, une femme. Il nous accompagne à devenir soi-même une figure d’attachement pour nos enfants. C’est d’ailleurs un moment clé dans une relation amoureuse de créer sa propre famille. La relation est parfois fragilisée. La fatigue, le quotidien, les concessions sont souvent la cause d’un éloignement et d’une non-communication dans le couple. Beaucoup supposent qu’en vivant ensemble ce lien est, par principe, acquis à vie. Mais certaines personnes éprouvent une grande difficulté à maintenir ce lien d’attachement, et s’éloignent sans vraiment le vouloir.

Le toucher permet, de façon concrète et abstraite, de ne pas se perdre. Cette stratégie de communication contribue à construire un lien durable, d’attachement fait de complicité, d’intimité et d’indépendance pour maintenir une relation heureuse à travers les défis et les contraintes. Il est fréquent que la mère, pendant les semaines qui suivent la naissance, se sente épuisée physiquement et émotionnellement. Ce dont elle a vraisemblablement besoin sont du repos, de la tendresse et des caresses. Comme, en général, le couple ne reprend une vie sexuelle épanouie qu’après un certain temps, le contact physique et l’intimité peuvent lui manquer.

Le massage peut être une source de plaisir et une expérience énergisante pour la nouvelle mère. Il renouvelle son potentiel d’énergie et la rend apte à satisfaire les besoins de son enfant. Ce sont des choses simples à lui proposer et à la portée de tous. Le mari peut, par exemple, en s’asseyant derrière elle, masser les épaules de sa conjointe pendant qu’elle est assise et qu’elle nourrit le bébé.

Conclusion

L’observation et l’évaluation de la relation parent(s)-enfant font partie intégrante des responsabilités inhérentes aux infirmières en périnatalité, travaillant auprès des jeunes familles. La compréhension de l’attachement permet de mieux interpréter l’expérience des parents et des enfants afin de soutenir le plus adéquatement possible les habiletés parentales. Un soutien aux parents contribue à prévenir les échecs dans l’établissement de la relation parent(s)-enfant et les conséquences négatives qui peuvent en résulter.

Le toucher constitue une aide simple, parfois évidente, pour favoriser le bien-être de l’enfant et de ses parents. C’est un véritable outil de communication avec le bébé, indispensable à l’enfant pour une bonne structuration de son mode relationnel. •

 

Références

[1] Dictionnaire de français Larousse en ligne. Définition de “Toucher”. www.larousse.

fr/dictionnaires/francais/ toucher/78627.

[2] Veldman F. Haptonomie. Science de l’aff ectivité. Redécouvrir l’humain. Paris :

Presses universitaires de France ; 2007.

[3] Rey ES, Martinez HG.Manejo racional del niñoprematuro. Universidad Nacional,

Curso de Medicina Fetal. Bogota (Colombie) : Universidad Nacional ; 1983.

[4] Dageville C, Casagrande F, De Smet S, et al. Il faut protéger la rencontre de la mère et de son nouveau-né autour de la naissance. Arch Pediatr

2011 ; 18(9) : 994 – 1000.

[5] Ribeiro E, Homo N. Le massage du nourrisson. Les techniques de massage à destination des professionnels de la petite enfance. Issy-les-Moulineaux : Elsevier Masson ; 2020.

[6] McClure V. 4 e éd Infant massage. A handbook for loving parents Londres (Royaume-Uni) : Souvenir Press ; 2021

 

Cahiers de la puéricultrice Juin-Juillet 2022 n° 358

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